Soigner les hommes et les animaux avec des goudrons végétaux en Méditerranée : une approche pluridisciplinaire sur le temps long
par Sylvain Burri
Les goudrons végétaux, extraits par distillation sèche du bois, ont été utilisés depuis la plus haute Antiquité en médecine humaine et vétérinaire. C’est particulièrement le cas des goudrons de conifères en Méditerranée, où ils sont encore produits et utilisés à des fins médicinales. Le projet ONGUENT vise à étudier ces goudrons médicinaux dans le cadre d’une analyse systémique, depuis la matière première végétale jusqu’au produit fini sur les deux rives de la Méditerranée aujourd’hui et par le passé (France, Maroc, Turquie), et en évaluant leur bioactivité, voire leur toxicité. Pour ce faire, la recherche croise les méthodologies et les points de vue issus des sciences humaines et des sciences de la vie, de l’environnement et de la matière. Au travers d’une approche croisée du système « goudron médicinal », la recherche s’organise en trois volets. Le premier s’intéresse aux ressources naturelles employées, aux savoirs et savoir-faire mis en œuvre et à l’impact micro-environnemental de cette activité. Le second s’attache au goudron en tant que matière et à sa composition biologique et chimique par l’acquisition et l’analyse de goudrons actuels de différentes essences végétales, la création d’un référentiel, l’analyse et la caractérisation des goudrons archéologiques et enfin la comparaison des spectres moléculaires des goudrons et des huiles essentielles. Le troisième axe vise à étudier l’usage de ces goudrons en médecine humaine et vétérinaire par le passé et aujourd’hui, à évaluer les propriétés médicinales réelles des goudrons et leur éventuelle toxicité. Par sa dimension rétroactive et prospective, ce projet répond autant à des enjeux heuristiques, proposant un dialogue interdisciplinaire inédit, et qu’à des enjeux sanitaires, socio-économiques, écologiques et patrimoniaux actuels