• Visite du chantier archéologique de l’Esplanade de Saint-Antoine : Les dernières découvertes

    • Date: samedi, 20 septembre 2014 à 10h00
    • Lieu: Esplanade de Saint-Antoine
    • Conférencier: Jean Terrier, archéologue cantonal et Evelyne Broillet-Ramjoué, archéologue responsable du chantier

Visite du chantier archéologique de l’Esplanade de Saint-Antoine : Les dernières découvertes

par Jean Terrier, archéologue cantonal et Evelyne Broillet-Ramjoué, archéologue responsable du chantier

La visite du site archéologique de l’esplanade Saint-Antoine sera l’occasion de présenter les nouvelles découvertes réalisées au cours de cette année sur ce chantier archéologique extraordinaire et de rappeler la présence de l’ancien Mottet de Saint-Laurent, vaste plateforme d’artillerie édifiée en 1537, peu après l’adoption de la Réforme protestante.

La création de cet ouvrage militaire, en avant de l’ancien front de fortification édifié au cours du Moyen Âge, a eu pour conséquence de protéger les couches archéologiques qui furent ainsi scellées à l’intérieur d’un immense écrin formé par de puissantes maçonneries. On peut considérer qu’il s’agit là d’une véritable aubaine si une telle richesse de vestiges a ainsi pu parvenir jusqu’à nous.

Les origines de l’oppidum celtique de Genava, agglomération fortifiée dont la fondation se place à l’aube du dernier quart du 2e siècle avant Jésus-Christ, peuvent être évoquées à partir de structures fournissant du matériel céramique contemporain. Dès l’époque augustéenne, c’est-à-dire vers 40 avant Jésus-Christ, des fosses dépotoirs ainsi que des traces de constructions témoignent d’une installation humaine plus marquée. De nombreux fragments de céramique, des ossements animaux ainsi que plusieurs objets appartiennent à cette période lointaine.

C’est dans ce contexte que se développera un quartier antique, le long d’une voie de circulation dont l’axe est repris par l’actuelle rue des Chaudronniers. Les vestiges des bâtiments appartenant à ce quartier résidentiel sont retrouvés sur le site, il s’agit de constructions aménagées en terrasse, dans la pente descendant en direction du lac. La découverte spectaculaire d’une importante concentration d’amphores à huile d’olive provenant du bassin de Guadalquivir en Espagne, disposées sur le sol d’une construction de façon régulière et sur deux niveaux, correspond à un vide sanitaire réalisé à l’époque de l’empereur Néron, c’est-à-dire entre 50 et 70 après Jésus-Christ. Hormis les vestiges de ce quartier antique, les nombreux objets découverts (céramiques, monnaies, lampes à huile, etc.) nous renseignent tant sur la vie quotidienne que sur les relations commerciales établies par les habitants de la ville durant la période gallo-romaine.

C’est au cours du Bas-Empire que des sépultures seront installées sur cette zone désormais extérieure à la cité, cette dernière étant réduite au sommet de la colline Saint-Pierre, confinée à l’intérieur d’une enceinte fortifiée. Le quartier antique est en partie abandonné et plusieurs séries de tombes sont installées dans les ruines des bâtiments. Les sépultures, dont certaines sont encore en cours de dégagement, sont placées dans des coffres de bois. Elles sont datées des 4e – 5e siècles. La fonction funéraire de ces lieux s’affirmera avec l’édification d’une vaste église funéraire dont les vestiges apparaissent progressivement. Une importante série de tombes en coffres de dalles occupe l’espace intérieur de l’église ainsi que ses annexes. Certaines de ces sépultures sont réalisées avec des dalles provenant du démantèlement des bâtiments antiques et c’est une partie de l’histoire de l’urbanisation gallo-romaine dont témoignent ces aménagements funéraires. Quant au cimetière organisé devant la façade occidentale et au sud de cette église, il comprend des inhumations de divers types (coffres de dalles, coffres de tegulae (tuiles antiques récupérées), coffres de bois, coffres mixtes, etc…).

Sur la base de ces éléments, cette église suburbaine peut être datée, au plus tard, dans le courant du 6e siècle. Dans l’état actuel des recherches, il semble bien que cet édifice chrétien fut détruit au début du Moyen Âge pour une raison que l’on ignore. Une chapelle lui a alors succédé. Il s’agit de la chapelle Saint-Laurent, mentionnée dans les sources d’archives dès le 12e siècle et détruite en 1532. C’est elle qui donnera son nom à la plateforme d’artillerie édifiée cinq années plus tard sur son emplacement: le Mottet de Saint-Laurent.

Le chantier archéologique de l’Esplanade Saint-Antoine qui devait prendre fin au cours du printemps 2014 est actuellement prolongé, vraisemblablement jusqu’à la fin de l’année, au vu de la richesse comme de l’importance des découvertes réalisées au fur et à mesure de l’avancement des recherches, notamment en ce qui concerne l’église suburbaine.