Sur les traces des forgerons Bassar (Nord Togo)
par Caroline Robion-Brunner
Le pays Bassar est une des principales régions sidérurgiques d’Afrique de l’Ouest. Grâce aux travaux de l’archéologue américain Philippe de Barros (1983, 1985, 1986), ce district métallurgique est connu pour avoir produit du fer dès 400 ans avant notre ère. A partir du 14ème siècle de notre ère, son activité s’intensifie et devenir l’activité principale de cette région. Elle finit par cesser au début du 20ème siècle avec la colonisation.
Les recherches menées dans le cadre du projet SIDERENT (Sidérurgie et Environnement au Togo), financé par l’Agence Française de la Recherche (ANR) et dirigé par Caroline Robion-Brunner depuis 2013, ont mis en évidence une diversité des techniques mises en œuvre pour transformer le minerai en métal et une histoire complexe des populations impliquées dans les activités sidérurgiques.
La quantité de fer produite durant les dernières décennies excédait la consommation locale. Durant cette période, les métallurgistes mettent en place une sectorisation géographique de la chaîne opératoire : les villageois de Dimuri se spécialisent dans le charbonnage ; autour de Bandjeli et au nord de Bassar, les métallurgistes extraient et réduisent le minerai ; le fer est transformé par les forgerons de Bitchabe et des alentours, ainsi qu’au sud de Bassar. Les techniques d’épuration de la loupe de fer brut ont été retranscrites et analysées par l’ethnologue Stéphan Dugast (1986). Elles se révèlent originales et complexes.
Une session expérimentale in situ a été organisée en février 2016 dans le village de Bitchabé. Les participants à cette expérience, descendants de forgeron, n’avaient jamais pratiqué cette opération d’épuration. Sous les conseils des anciens, ils ont reconstitué au mieux les gestes et les outils nécessaires pour forger des préformes en fer. Cette activité ancestrale très importante dans l’économie locale ancienne, abandonnée depuis environ un siècle, a fait l’objet d’un film documentaire en partenariat avec l’Ecole Nationale Supérieure d’Audio-Visuel de Toulouse (janvier 2018).
Toute personne que le sujet intéresse est cordialement invitée.